Source: The Conversation – in French – By Kaitano Dube, Faculty of Human Sciences Acting Research Professor, Vaal University of Technology
En Afrique, moins d’une ligne aérienne sur cinq est un vol direct. Les liaisons aériennes sont déterminées par des facteurs tels que le niveau des échanges commerciaux, les relations diplomatiques et l’existence d’une demande suffisante pour rendre une ligne rentable financièrement. À cause du manque de vols directs, les voyageurs qui souhaitent se rendre d’un pays africain à un autre sont souvent obligés de passer par l’Europe ou le Moyen-Orient. Cette situation renchérit le coût des déplacements et freine à la fois le tourisme et les investissements sur le continent.
En 2025, l’Afrique du Sud assure la présidence du G20, le groupe des grandes puissances économiques. Parmi ses quatre priorités dans le domaine du tourisme, figure la modernisation des accords aériens pour faciliter les vols directs ou les voyages sans rupture entre pays.
L’une de ses priorités est de promouvoir des accords de services aériens modernisés qui permettent des vols directs, ou des voyages sans interruption, entre les pays. Kaitano Dube, géographe spécialisé dans le tourisme, nous explique les enjeux.
Pourquoi la connectivité aérienne est-elle importante pour les pays africains ?
La connectivité aérienne mesure la facilité avec laquelle les personnes et les marchandises peuvent circuler par avion entre deux lieux. Elle est basée sur le nombre de destinations desservies et la fréquence des vols entre celles-ci.
Depuis longtemps, pouvoir voyager facilement à l’intérieur de l’Afrique est un rêve pour les entreprises touristiques et les touristes. Il a été perturbé par la pandémie de COVID-19, mais la reprise post-COVID-19 de l’industrie touristique a révélé que l’envie de voyager reste toujours forte.
Le tourisme est l’un des secteurs économiques les plus résilients au monde. Dans de nombreuses économies du G20, le tourisme contribue à plus de 10 % du produit intérieur brut. Mais les retombées sont très inégales : elles profitent surtout aux pays qui disposent d’un bon réseau aérien.
L’Afrique possède pourtant un riche patrimoine naturel et culturel, reconnu à l’échelle mondiale, avec de nombreux sites classés au patrimoine mondial. Mais de nombreux sites clés, tels que le parc national des montagnes du Simien en Éthiopie, les plateaux de grès du massif de l’Ennedi au Tchad ou le parc national du Banc d’Arguin en Mauritanie, sont parmi les moins accessibles.
La mauvaise connectivité aérienne freine la croissance économique, limite les investissements et maintient des millions de personnes en marge de la chaîne de valeur mondiale du tourisme. De nombreux voyageurs potentiels qui souhaiteraient voyager en Afrique aujourd’hui sont freinés par les coûts et la complexité des trajets.
Que fait la présidence sud-africaine du G20 en matière de connectivité aérienne ?
Le G20 a noté qu’une action coordonnée au niveau mondial pour améliorer la connectivité, en particulier pour les destinations émergentes, permettrait d’attirer davantage de visiteurs vers les régions encore peu fréquentées. Cela permettrait de répartir plus équitablement les bénéfices du tourisme sur l’ensemble du continent.
C’est pourquoi la présidence sud-africaine a choisi de faire de la connectivité sans rupture l’une de ses quatre priorités principales pour dynamiser le tourisme.
Le groupe de travail sur le tourisme du G20 a réfléchi à des moyens de promouvoir cette initiative et publiera un rapport sur le tourisme.
Les ministres du Tourisme du G20 ont également publié une déclaration encourageant les membres du G20 à créer les conditions nécessaires à des voyages aériens sans encombre.
Qu’est-ce qui faciliterait les vols en Afrique ?
Le G20 peut prendre six mesures clés :
Libéraliser le ciel : cela signifie simplement que les États membres du G20 devraient ouvrir des accords de services aériens (les accords officiels entre pays qui permettent aux compagnies aériennes de voler entre eux). Cela implique de réduire les restrictions sur les itinéraires ou la fréquence des vols et de permettre aux compagnies aériennes d’opérer plus librement. Il serait ainsi plus facile pour les compagnies aériennes de créer de nouvelles liaisons, de fixer des prix équitables et de se faire concurrence. Les voyageurs auraient ainsi plus de choix.
Relier les régions isolées : les destinations mal desservies par les compagnies aériennes, telles que celles situées en Afrique, en Amérique latine et en Asie du Sud-Est, devraient être reliées. Cela pourrait stimuler le tourisme et le commerce sur les liaisons mal desservies et créer des emplois et des opportunités économiques dans ces régions.
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Promouvoir les carburants aériens verts et les technologies à faibles émissions : cela fait partie de la modernisation des compagnies aériennes afin qu’elles atteignent d’ici 2050 l’objectif Net Zero de réduction à zéro des émissions de gaz à effet de serre d’origine humaine.
Intégrer les politiques du tourisme et des transports : le G20 devrait encourager l’intégration des politiques du tourisme et des transports dans tous les États membres ou au sein des pays. Cela permettra de réduire le temps nécessaire aux compagnies aériennes pour obtenir des autorisations de vol et de diminuer les coûts d’exploitation et d’octroi de licences.
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Réduire les obstacles liés aux visas et à la fiscalité : les États membres du G20 doivent réduire les redevances d’atterrissage, les taxes aéroportuaires et autres redevances aéronautiques afin de permettre à davantage de personnes de voyager. Les systèmes de visa doivent également être simplifiés afin de faciliter les voyages.
Création d’un indice de connectivité aérienne du G20 pour suivre les progrès : un portail mondial en ligne mesurant l’augmentation de la connectivité aérienne doit être mis en place par les États membres du G20. Il pourrait mesurer l’expansion des liaisons aériennes, les coûts des vols, les émissions de gaz à effet de serre des compagnies aériennes et la fréquence des vols intérieurs en Afrique.
Comment l’Afrique du Sud peut-elle mettre à profit sa présidence du G20 pour y parvenir ?
L’Afrique du Sud joue un rôle de passerelle pour le marché unique africain du transport aérien de l’Union africaine. Celui-ci fournit un cadre pour la libéralisation du ciel intra-africain grâce à la création d’un marché aérien unique et unifié.
Ce marché n’est pas encore pleinement mis en place, à cause du manque de volonté politique de plusieurs États africains membres de l’Union africaine. Il existe également des déficits en matière d’infrastructures : certains pays ont du mal à développer des aéroports et des systèmes de navigation aérienne adéquats. Le maintien de compagnies aériennes nationales économiquement viables a également été un combat pour les pays africains.
L’Afrique du Sud pourrait utiliser sa position au G20 pour mobiliser les pays riches et obtenir leur appui technique, leurs investissements et leur confiance afin de faire aboutir ce marché unique. Les effets seraient considérables : ouverture de nouvelles routes, baisse des tarifs, hausse du nombre de touristes et coopération accrue entre les régions africaines autour de projets communs de tourisme et de commerce.
Des recherches ont montré que le marché unique africain du transport aérien pourrait générer 1,3 milliard de dollars américains de produit intérieur brut supplémentaire et créer plus de 150 000 emplois par an. En d’autres termes, un marché aérien unique pourrait entraîner une augmentation du tourisme et créer de la richesse à travers le continent grâce aux voyages, au tourisme et à l’hôtellerie.
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Kaitano Dube does not work for, consult, own shares in or receive funding from any company or organisation that would benefit from this article, and has disclosed no relevant affiliations beyond their academic appointment.
– ref. Les liaisons aériennes en Afrique manquent de fluidité : le G20 peut-il changer la donne ? – https://theconversation.com/les-liaisons-aeriennes-en-afrique-manquent-de-fluidite-le-g20-peut-il-changer-la-donne-268454
