Source: The Conversation – in French – By Mahtaab Hayat, Lecturer, University of the Witwatersrand
Le cancer du sein est le cancer le plus fréquent chez les femmes dans le monde. En Afrique subsaharienne, il est aussi la principale cause de décès liés au cancer.
Les facteurs de risque connus incluent le fait d’être une femme, l’âge, le surpoids, la consommation d’alcool et les prédispositions génétiques.
Dans ce domaine, les études dites « d’association à l’échelle du génome » ou études d’association pangénomique constituent un outil puissant. Elles permettent d’identifier les variantes génétiques courantes, ou mutations, qui peuvent influencer la probabilité de développer une maladie. Ces études analysent l’ensemble du génome (l’ADN complet d’une personne) afin de trouver les différences génétiques présentes chez les personnes atteintes d’une maladie.
Depuis 2005, ces études ont fourni des informations utiles pour le diagnostic, le dépistage et la prédiction de certaines maladies, notamment le cancer du sein. Les découvertes récentes ont été utilisées pour développer des outils de prédiction qui aident à identifier les personnes présentant un risque élevé de développer des maladies. Les scores de risque génétique (également appelés scores de risque polygénique) estiment la prédisposition à une maladie en fonction de l’effet cumulatif de multiples variantes ou mutations génétiques.
Mais la plupart des recherches ont été menées sur des populations d’ascendance européenne. Cela pose un problème, car la diversité génétique et la variabilité environnementale diffèrent à travers le monde. En Afrique, la diversité génétique est la plus importante observée mondialement.
Pour combler cette lacune, nous, chercheurs de l’université de Wits, du Sydney Brenner Institute for Molecular Bioscience et nos collaborateurs du Registre National du Cancer d’Afrique du Sud (South African National Cancer Registry), avons mené la première étude d’association pangénomique sur le cancer du sein dans une population d’Afrique subsaharienne.
Nous avons comparé les variations génétiques entre les femmes atteintes d’un cancer du sein et celles qui n’en sont pas atteintes, à la recherche de variantes qui ont une différence de fréquence entre les Malades atteints de cancer et les individus sans cancer.
Nous avons identifié deux variantes génomiques proches des gènes RAB27A et USP22 qui contribuent au risque de cancer du sein chez les femmes noires sud-africaines. Ces variantes génétiques n’avaient jamais été associées au cancer du sein dans les populations non africaines auparavant.
Nos résultats soulignent l’importance d’identifier les variantes génétiques spécifiques à une population, en particulier dans les populations peu étudiées. Différentes populations peuvent être porteuses de variantes uniques qui contribuent différemment au risque de cancer du sein. Les variantes à risque trouvées dans d’autres populations peuvent ne pas être présentes dans les populations africaines. Cela renforce l’idée que les efforts de recherche et les scores de risque doivent être réalisés dans différentes populations, y compris les populations africaines.
Comparaison de l’ADN des femmes
Les chercheurs ont comparé l’ADN de 2 485 femmes atteintes d’un cancer du sein à celui de 1 101 femmes non touchées par la maladie. Toutes ces femmes résidaient à Soweto, en Afrique du Sud. Les cas de cancer du sein ont été recrutés dans le cadre de l’étude du Johannesburg Cancer Study sur une période de 20 ans et les témoins provenaient de l’étude Africa Wits-INDEPTH Partnership for Genomic Research.
L’analyse a utilisé une technologie (appelée puce ADN) spécialement conçue par le consortium H3Africa pour étudier la diversité génétique des populations africaines.
En comparant les variations génétiques chez les femmes atteintes d’un cancer du sein et celles qui n’en sont pas atteintes, nous avons identifié deux variantes génétiques qui contribuent au risque de cancer du sein chez les femmes noires sud-africaines. Elles sont situées à proximité de gènes impliqués dans la croissance des cellules cancéreuses, leur capacité à se propager (métastases) et le développement de tumeurs dans différents cancers.
Nous avons également appliqué des scores de risque polygéniques à notre ensemble de données africaines. Il s’agit d’une méthode qui estime le risque de cancer du sein pour un individu en fonction de la présence de variantes à risque. Ces variantes sont dérivées des résultats d’études d’association pangénomique. Le score de risque que nous avons utilisé était basé sur les variantes à risque d’une population européenne. Nous l’avons utilisé pour évaluer sa capacité à prédire le cancer du sein dans notre population africaine.
Les résultats ont montré que le score de risque était moins efficace pour prédire le cancer du sein dans notre population d’Afrique subsaharienne que dans une population européenne.
La prochaine étape
Il s’agit ici de la première analyse d’association pangénomique à grande échelle en Afrique subsaharienne visant à identifier les facteurs génétiques qui influencent le risque d’une personne de développer un cancer du sein.
Notre étude a porté sur moins de 4 000 échantillons. Des études génétiques plus importantes sur le cancer du sein ont porté sur plus de 200 000 cas et témoins, mais sans représentation des populations d’Afrique subsaharienne. Cela souligne le besoin urgent d’intensifier les efforts de recherche et d’accroître la participation du continent.
Les résultats de cette étude et des études futures aideront les médecins à dépister les patientes et à identifier celles qui présentent un risque élevé. Une fois que nous savons qui présente un risque élevé, nous pouvons leur proposer des examens plus fréquents et des mesures préventives. Cela nous permet de détecter le cancer du sein à un stade précoce, voire de le prévenir, avant qu’il n’ait eu le temps de se développer ou de se propager.
Des recherches supplémentaires seront nécessaires pour comprendre comment ces gènes augmentent le risque de développer un cancer du sein et améliorer la prédiction du cancer du sein. Il est à noter que l’application des scores de risque polygéniques dérivés de l’Europe n’a pas permis de prédire avec précision le cancer du sein dans l’ensemble des populations africaines. Ces résultats sont cohérents avec les conclusions précédemment rapportées pour d’autres maladies.
Enfin, les chercheurs participent aussi à une étude mondiale sur la génétique du cancer du sein, appelée Confluence, qui prend en compte de nombreuses populations, y compris africaines.
Le professeur Christopher Mathew et Beth Amato ont contribué à la rédaction de cet article.
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ean-Tristan Brandenburg receives funding from the German Federal Ministry of Education and Research (BMBF) under grant 01KA2220B to the RHISSA Programme for the NORA Consortium. Additionally, he is supported by the Science for Africa Foundation through Programme Del-22-008, with funding from the Wellcome Trust and the UK Foreign, Commonwealth & Development Office. He is also a participant in the EDCPT2 programme, which is supported by the European Union.
Mahtaab Hayat does not work for, consult, own shares in or receive funding from any company or organisation that would benefit from this article, and has disclosed no relevant affiliations beyond their academic appointment.
– ref. Cancer du sein : une nouvelle étude révèle un risque génétique chez les femmes africaines – https://theconversation.com/cancer-du-sein-une-nouvelle-etude-revele-un-risque-genetique-chez-les-femmes-africaines-264509
