Source: The Conversation – France (in French) – By Alejandro Martínez, Personal de investigación en el grupo Neuro-colab, UDIT – Universidad de Diseño, Innovación y Tecnología

Même s’ils commencent à parler un peu plus tard, les enfants bilingues traitent les informations avec plus de souplesse. Voici ce qui se passe dans leur cerveau et comment favoriser ce processus.
Lorsque les enfants grandissent en entendant deux langues, leur famille et leurs enseignants s’inquiètent parfois : vont-ils s’embrouiller ? Vont-ils mettre plus de temps à parler ? Cela va-t-il affecter leurs résultats scolaires ?
Ces doutes sont compréhensibles : en effet, les enfants bilingues peuvent mettre un peu plus de temps à prononcer leurs premiers mots ou mélanger les deux langues au début. Cependant, il ne s’agit pas d’un retard pathologique, mais d’une étape naturelle de leur apprentissage. En réalité, ils traitent deux fois plus d’informations linguistiques, ce qui constitue un entraînement supplémentaire pour leur cerveau, qui s’en trouve renforcé de manière très bénéfique pour toute leur vie.
Que signifie être bilingue ?
Être bilingue ne signifie pas simplement parler couramment deux langues : une personne bilingue est celle qui utilise régulièrement les deux langues dans sa vie. Cela inclut ceux qui apprennent une langue à la maison et une autre à l’école, les enfants qui parlent une langue avec un parent et une autre avec l’autre, ou ceux qui vivent dans des communautés où deux langues sont couramment utilisées.
Mais est-on bilingue pour toujours ? La réponse est nuancée. Une personne peut cesser d’utiliser l’une de ses langues et, avec le temps, la perdre : perte de vocabulaire, de fluidité ou de précision. Cependant, même si la compétence pratique diminue, le cerveau conserve les traces de cet apprentissage précoce. Des études récentes montrent que les avantages cognitifs, tels que la flexibilité mentale ou la réserve cognitive, persistent même chez ceux qui ont cessé d’utiliser activement leurs deux langues.
Le cerveau bilingue en développement
Pendant l’enfance, le cerveau est très plastique. L’hypothèse de la période critique suggère que l’apprentissage précoce des langues favorise une organisation cérébrale plus intégrée : les réseaux neuronaux des différentes langues se chevauchent et coopèrent, au lieu de fonctionner séparément comme c’est souvent le cas chez les adultes.
Par exemple, un enfant qui apprend l’anglais et l’espagnol dès son plus jeune âge peut passer d’une langue à l’autre rapidement et naturellement, tandis qu’un adulte aura besoin de plus d’efforts et d’énergie pour changer de langue. Il existe diverses études de neuro-imagerie montrent que plus une deuxième langue est acquise tôt, plus ses réseaux neuronaux se superposent à ceux de la première langue, ce qui réduit l’effort nécessaire pour changer de langue.
Un double apprentissage, sans ralentissement
Dans la pratique, même si les enfants bilingues semblent commencer à parler plus tard, ils répartissent en fait leur vocabulaire entre deux langues. Si un enfant monolingue connaît 60 mots en espagnol, un enfant bilingue peut en connaître 30 en anglais et 30 en espagnol : le total est le même. En d’autres termes, ils progressent plus lentement dans chaque langue séparément, mais pas dans leur développement linguistique global.
Au-delà du vocabulaire, la gestion de deux langues dès le plus jeune âge entraîne le contrôle exécutif, qui comprend la capacité à se concentrer, à alterner les tâches et à filtrer les distractions. Par exemple, un enfant bilingue peut passer rapidement des instructions en espagnol à celles en anglais en classe, ou choisir la langue appropriée en fonction de son interlocuteur. Ces situations renforcent la mémoire de travail et l’attention soutenue.
Le cerveau bilingue supprime également temporairement la langue dont il n’a pas besoin dans chaque contexte. Ce processus, connu sous le nom de « contrôle inhibiteur », ne signifie pas « effacer » une langue, mais la désactiver momentanément afin que l’autre puisse s’exprimer sans interférence. Cette gymnastique cérébrale renforce les réseaux liés à la prise de décision, à la planification et à la résolution de problèmes.
Des avantages tout au long de la vie
Le bilinguisme n’apporte pas seulement des avantages pendant l’enfance : ses effets positifs peuvent perdurer même si, avec les années, l’une des langues n’est plus utilisée régulièrement. Même si cette deuxième langue peut être perdue, l’entraînement cognitif précoce continue à agir.
Par exemple, les personnes âgées qui ont grandi en parlant deux langues présentent plus de matière grise dans des zones clés du cerveau et peuvent retarder l’apparition des symptômes de la maladie d’Alzheimer.
Flexibilité cognitive
De plus, la maîtrise de deux langues favorise la flexibilité cognitive, c’est-à-dire la capacité à s’adapter à des situations changeantes. Lorsqu’un enfant ou un adolescent change de langue en fonction de son interlocuteur, lit un texte dans une langue puis explique la même idée dans une autre, il exerce sa capacité de concentration et d’attention focalisée dans d’autres contextes : jeux, conversations dans des environnements bruyants, changements inattendus en classe ou activités extrascolaires. Cette flexibilité lui permet d’acquérir de nouvelles compétences plus facilement.
La conclusion n’est pas que les personnes bilingues soient « meilleures » que les autres, mais que leur cerveau apprend à gérer les informations différemment, ce qui leur permet de relever plus facilement des défis variés.
Ces expériences contribuent à ce que les scientifiques appellent la « réserve cognitive », une ressource mentale qui protège le cerveau et aide à maintenir les capacités cognitives pendant des décennies, même chez les personnes âgées.
Comment tirer parti des avantages du bilinguisme
Encourager le bilinguisme ne signifie pas faire pression ou forcer les résultats, mais créer des contextes naturels d’exposition aux deux langues. Lire des histoires dans deux langues, regarder des films en version originale sous-titrée, chanter des chansons, jouer à des jeux de rôle ou avoir des conversations dans une langue étrangère sont des moyens informels de pratiquer sans en faire une obligation.
C’est important car, même si les programmes scolaires, tels que la méthode EMILE (enseignement d’une matière intégré à une langue étrangère) ont un rôle à jouer, le bilinguisme quotidien s’enrichit dans des situations plus spontanées : cuisiner en suivant des recettes en français, jouer à des jeux vidéo en anglais ou partager des histoires familiales dans la langue maternelle. Ces expériences renforcent le lien émotionnel avec la langue et en font un outil vivant, au-delà de l’école.
Loin d’être un défi, l’exposition à deux langues est une opportunité pour les enfants de développer un cerveau flexible, bien connecté et capable d’organiser efficacement les connaissances. Grandir dans des contextes qui valorisent les deux langues permet de tirer parti de ces avantages cognitifs et culturels, en soutenant à la fois leur apprentissage scolaire et leur développement personnel.
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Alejandro Martínez ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d’une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n’a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.
– ref. Parler deux langues dès le plus jeune âge : un entraînement cérébral pour toute la vie – https://theconversation.com/parler-deux-langues-des-le-plus-jeune-age-un-entrainement-cerebral-pour-toute-la-vie-265601
