Les animaux de compagnie sont-ils des gages de bonheur ? Des recherches apportent des bémols

Source: The Conversation – in French – By Christophe Gagné, PhD candidate, Psychology, Université du Québec à Montréal (UQAM)

Les gens se tournent souvent vers les animaux de compagnie pour améliorer leur humeur et trouver de la compagnie. Améliorer le bien-être et réduire la solitude font partie des raisons les plus souvent citées pour adopter un animal.

La croyance selon laquelle les animaux de compagnie apportent de nombreux bienfaits à leurs propriétaires est très répandue, mais des recherches montrent qu’avoir un animal n’est pas une panacée pour la santé psychologique.

Malgré cela, les animaux de compagnie sont souvent présentés dans les médias et sur les réseaux sociaux comme des solutions efficaces pour réduire le stress et la solitude, entretenant l’idée répandue de leurs bienfaits pour la santé. Cela peut inciter les gens à adopter des animaux de compagnie sans tenir pleinement compte des responsabilités et des exigences que cela implique, ce qui peut avoir des conséquences négatives tant pour eux-mêmes que pour leurs animaux.

En tant que psychologues sociaux étudiant les relations entre les humains et les animaux de compagnie, nous adoptons une approche plus nuancée, en examinant quand, comment et pour qui les animaux de compagnie peuvent — ou non — améliorer le bien-être.

Ce que dit la recherche

De nombreuses études ont montré que les propriétaires d’animaux de compagnie sont moins anxieux, se sentent moins seuls et moins stressés que les personnes qui n’en ont pas. Les propriétaires d’animaux domestiques se déclarent également plus satisfaits de leur vie.

Ces études retiennent souvent notre attention, car elles font écho à une croyance largement répandue : nos animaux domestiques sont bons pour nous. Ce type de recherche rassure et valide le lien profond que nous pouvons ressentir avec nos compagnons. Mais elles ne montrent qu’un seul côté de la médaille.

D’autres études n’ont trouvé aucun lien significatif entre le fait d’avoir un animal de compagnie et le bien-être humain. En fait, les personnes qui ont des animaux de compagnie ne déclarent pas nécessairement un bien-être plus élevé ni une meilleure santé mentale que celles qui n’en ont pas.

Notre étude sur le rôle des animaux de compagnie dans le bien-être humain, menée au Canada pendant la pandémie de Covid-19, a donné des résultats surprenants : elle a révélé qu’avoir un animal de compagnie était généralement associé à un bien-être et une santé mentale moindres.

L’étude portait à la fois sur des propriétaires d’animaux de compagnie et des personnes sans animaux, dans le but de comparer les deux groupes au niveau de différents indicateurs de bien-être pendant la pandémie. Les propriétaires d’animaux ont déclaré un bien-être inférieur à celui des non-propriétaires pendant cette période, notamment des niveaux de solitude plus élevés.

Ces incohérences entre les différentes études montrent que le lien entre le fait d’avoir un animal de compagnie et le bien-être n’est pas si simple. Notre étude a révélé certaines de ces nuances. Par exemple, par rapport aux propriétaires d’autres animaux de compagnie, les propriétaires de chiens ont déclaré un bien-être plus élevé.

Pour comprendre ces résultats mitigés, les chercheurs ont commencé à examiner de plus près la nature de la relation entre les propriétaires et leurs animaux de compagnie. Cette approche pourrait nous aider à mieux comprendre les facteurs qui font en sorte que la présence d’un animal de compagnie soit bénéfique au bien-être.

La qualité du lien

Tout comme nos relations avec les autres êtres humains, le lien qui nous unit à nos animaux de compagnie est complexe. De nombreux aspects de cette relation peuvent influencer les bienfaits que nous en tirons. Ce n’est pas seulement le fait d’avoir un animal de compagnie qui compte, mais aussi la façon dont nous tissons des liens avec eux et interagissons avec eux.

Par exemple, les propriétaires qui ressentent plus d’anxiété à l’idée d’être séparés de leur animal, ou qui remettent davantage en question l’affection de celui-ci, ce qui reflète un attachement inquiet à l’animal, disent également se sentir plus déprimés. Le fait de percevoir nos animaux de compagnie comme moins compréhensifs ou plus insensibles à nos besoins est également associé à des niveaux plus élevés de dépression, d’anxiété et de solitude.




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À l’inverse, plus les gens ont le sentiment de partager des caractéristiques avec leurs animaux de compagnie (par exemple, la loyauté, la paresse), plus ils sont susceptibles de rapporter un bien-être plus élevé. Les animaux de compagnie sont également perçus comme vivant dans le présent, sans s’attarder sur le passé ni s’inquiéter pour l’avenir. Interagir en faisant preuve de présence attentive avec nos animaux peut nous aider à nous concentrer sur le moment présent, ce qui favorise également un plus grand bien-être.

En cultivant les aspects positifs de nos relations avec nos animaux de compagnie et en travaillant sur les aspects plus difficiles, nous pouvons atténuer le stress lié à certains des défis que représente leur prise en charge, notamment les ressources financières nécessaires ou l’anxiété que nous ressentons lorsqu’ils tombent malades.

Avoir un animal de compagnie : les défis

En réalité, avoir un animal de compagnie s’accompagne de responsabilités et de défis qui ne semblent pas être abordés aussi souvent que les avantages. Ces aspects plus difficiles de la prise en charge d’un animal de compagnie peuvent parfois être éprouvants sur le plan émotionnel et nuire au bien-être psychologique du propriétaire.

Avoir des animaux de compagnie, même si on les aime beaucoup, demande du temps, de l’énergie et des ressources financières. Pour certains, cette responsabilité peut représenter une source supplémentaire de stress. Dans notre étude, le fait d’avoir un animal de compagnie était associé, durant la pandémie de Covid-19, à un bien-être moindre chez les femmes et chez les personnes ayant deux enfants ou plus à la maison, des groupes déjà confrontés à des exigences accrues liées aux enfants et aux tâches ménagères.


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De même, avoir un animal de compagnie était associée à un bien-être moindre chez les personnes sans emploi ou ayant un emploi moins stable (par exemple, les étudiants, les personnes au foyer). Des ressources financières limitées pouvaient rendre plus difficile la prise en charge de l’animal.

De même, devoir s’occuper d’un animal malade peut être éprouvant sur le plan émotionnel pour les propriétaires. Les personnes qui s’occupent de chiens atteints d’une maladie chronique déclarent se sentir désespérées et impuissantes, en particulier lorsqu’elles ne peuvent pas soulager la souffrance de leur animal.

D’autres facteurs, tels que les problèmes de comportement d’un animal et le deuil vécu après la perte d’un animal de compagnie, peuvent également être difficiles à vivre pour les propriétaires. Pour ceux qui envisagent d’adopter un animal, il est important de tenir compte de ces réalités afin de prendre une décision éclairée.

Répondre aux besoins de notre animal

Il y a de nombreux facteurs importants à prendre en compte avant d’accueillir un nouvel animal de compagnie dans notre maison. Avant tout, nous devons nous assurer que nous avons le temps, l’énergie et les ressources nécessaires pour répondre à ses besoins.

Choisir un animal de compagnie avec soin, en fonction de ce que nous pouvons réellement lui offrir et sur la base d’informations fiables concernant ses caractéristiques et ses besoins, nous donne les meilleures chances d’avoir une relation positive et épanouie.

Répondre aux besoins de nos animaux de compagnie peut également améliorer notre propre bien-être en tant que propriétaires, démontrant ainsi le potentiel des relations interespèces mutuellement bénéfiques. Mais lorsque ces besoins ne sont pas satisfaits, les animaux de compagnie et leurs propriétaires peuvent finir par se sentir stressés et anxieux.

Lorsque l’on envisage d’adopter un animal de compagnie, il est important de se poser la question suivante : pourquoi voulons-nous un animal de compagnie ? Si l’idée est d’améliorer notre bien-être psychologique, nos recherches suggèrent qu’il faudrait peut-être y réfléchir à deux fois.

La Conversation Canada

Catherine Amiot fait partie du conseil d’administration émergent de la PHAIR Society, une société savante qui vise à promouvoir la recherche sur les relations intergroupes entre les humains et les animaux. Elle a reçu du financement du Conseil de recherches en sciences humaines du Canada (CRSH) et du Fonds de recherche du Québec – Santé (FRQS) pour les recherches menées dans son laboratoire et présentées dans cet article.

Christophe Gagné ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d’une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n’a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.

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