Source: The Conversation – in French – By Kristina K. Castaneto, Ph.D. Candidate in Social Psychology, Simon Fraser University
Imaginez : un matin, en buvant votre café, vous pensez à un vieil ami. Vous n’avez pas parlé à cette personne depuis longtemps, mais vous y pensez avec affection et vous vous demandez comment elle va. Vous commencez à taper « bonjour ! », puis effacez le message avant de l’envoyer. Vous est-il déjà arrivé quelque chose de similaire ? Si oui, vous n’êtes pas seul.
Des recherches menées dans notre laboratoire ont montré que jusqu’à 90 % des personnes interrogées déclarent avoir un « vieil ami », c’est-à-dire un ami qui leur est cher, mais avec lequel elles ont perdu contact. Si la plupart aimeraient renouer, seulement 30 % le font réellement, même lorsque la relation s’est bien terminée et que les coordonnées sont disponibles.
Cette réticence à reprendre contact avec d’anciens amis est surprenante, car de nombreuses recherches démontrent que les relations sociales sont un facteur prédictif important de la santé et du bonheur. En effet, le fait d’avoir un réseau social plus vaste et plus diversifié est associé à un plus grand bien-être.
Écrire des messages
Alors, qu’est-ce qui incite une personne à reprendre contact avec un vieil ami ?
Dans notre nouvelle étude, nous avons analysé le contenu des messages de prise de contact envoyés à un vieil ami, pour voir si certains types de messages influencent la probabilité qu’ils soient envoyés. Par exemple, les gens sont-ils plus susceptibles d’envoyer une note axée sur le passé, le présent ou l’avenir ?
Pour le savoir, nous avons analysé plus de 850 messages recueillis lors d’études précédentes. Chaque participant a rédigé un message destiné à un ancien ami spécifique et pouvait choisir de l’envoyer ou non. Cela nous a permis de comparer le contenu des messages envoyés à celui de ceux qui n’ont pas été transmis.
Chaque message a été analysé selon plus de 20 critères, comme la longueur, les émotions exprimées ou la présence de souvenirs personnels. Douze de ces critères ont été étudiés à l’aide d’un logiciel informatique, Linguistic Inquiry Word Count (LIWC), qui mesure automatiquement des éléments comme le nombre de mots, l’orientation temporelle (passé, présent ou futur) et l’intensité des émotions positives et négatives.
En complément, une équipe de codeurs humains a évalué chaque message sur 13 aspects plus subjectifs et complexes, difficiles à détecter pour un logiciel. Ils ont notamment vérifié si l’auteur partageait des souvenirs précis avec son vieil ami ou reconnaissait sa part de responsabilité dans la relation qui s’était distendue.

(Sarah Brown/Unsplash), CC BY
Révéler des informations
Malgré tout ce codage, nous ne pouvions toujours pas prédire quels messages seraient envoyés. En revanche, notre analyse a révélé des tendances intéressantes : les messages destinés à de vieux amis étaient souvent positifs et centrés sur le présent.
Nous avons utilisé des régressions statistiques pour relier les caractéristiques des messages au comportement de prise de contact : seules six variables se sont révélées significatives, mais leurs effets étaient faibles et incohérents entre nos deux échantillons.
Cela suggère que le contenu d’un message ne permet pas de prédire qui choisira d’envoyer son message et qui ne le fera pas.
Qui prend contact ?
Comme le contenu des messages de prise de contact ne nous a pas apporté beaucoup d’informations, nous avons réorienté notre attention vers la question suivante : qui est le plus susceptible de prendre contact avec un vieil ami ?
Pour explorer cette question, nous avons recruté 312 participants sur le campus et dans des espaces publics de la ville afin de leur faire remplir un questionnaire. Le questionnaire commençait par demander aux participants d’identifier un vieil ami. Ce vieil ami était une personne à laquelle les participants tenaient, mais à laquelle ils n’avaient pas parlé depuis longtemps, qui, selon eux, aimerait avoir de leurs nouvelles et dont ils avaient les coordonnées.
Les participants ont ensuite répondu à une série de questions les concernant, notamment sur leur bonheur, leur solitude, leur personnalité, leur satisfaction en matière d’amitié et leurs convictions en la matière.
Vers la fin du sondage, nous avons demandé aux participants s’ils étaient prêts à contacter leur vieil ami, puis nous leur avons donné deux minutes pour rédiger un petit mot à l’intention de l’ami qu’ils avaient identifié précédemment. Une fois les deux minutes écoulées, nous avons demandé aux participants s’ils avaient envoyé le message à leur vieil ami.
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Comme dans les recherches précédentes, 34,2 % des participants ont choisi de contacter leur vieil ami. Et si certaines dimensions de la personnalité et d’autres variables permettent de savoir qui sera le plus susceptible de répondre, une seule variable, la « résilience de l’amitié », permettait de prédire si les participants avaient envoyé leur message à leur vieil ami.
Le concept de résilience de l’amitié fait référence à la conviction que les amitiés peuvent perdurer même après de longues périodes de faible interaction. C’est un sujet que nous étudions actuellement dans notre laboratoire.

(Erika Giraud/Unsplash), CC BY
Faites le grand saut
Si l’idée de reprendre contact avec un vieil ami vous traverse à nouveau l’esprit, ne cherchez pas le message parfait, lancez-vous !
Par exemple, vous pouvez écrire lorsque vous entendez une chanson que vous aimiez tous les deux, tombez sur un mème qui vous rappelle cette personne, ou simplement pour dire : « Salut, ça fait longtemps ! Comment vas-tu ? »
Nos conclusions montrent que la réticence à contacter d’anciens amis n’est pas le fait d’un seul type de personne, et que les messages envoyés ne suivent pas un modèle unique.
L’hésitation à contacter un ancien ami est courante, mais la plupart des gens en sont capables s’ils décident de se lancer. Prendre conscience de cela peut encourager à renouer le contact.
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Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d’une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n’ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.
– ref. Reprendre contact avec de vieux amis : un geste difficile, mais gratifiant – https://theconversation.com/reprendre-contact-avec-de-vieux-amis-un-geste-difficile-mais-gratifiant-264552
